Organisations chrétiennes

Des organisations chrétiennes ont aidé des chrétiens d'origine juive et des juifs convertis au christianisme  à émigrer, leur ont fourni des faux-papiers et des visas.

Ainsi, l'association Saint-Paul ("Paulus-Bund") a apporté son aide aux persécutés. Le bureau Grüber, fondé en 1938 par le pasteur Heinrich Grüber, apportait son soutien aux protestants d'origine juive en leur proposant une aide juridique et en les aidant à trouver un pays d'accueil. Le pasteur Grüber fut arrêté en 1940 et déporté au camp de concentration de Sachsenhausen puis à Dachau. L'un de ses collaborateurs, Werner Sylten, un membre de l'Église confessante d'origine juive, fut arrêté en 1941, déporté au camp de concentration de Dachau et assassiné.

    

Gertrud Staewen, une pédagogue membre de l'Église confessante, dont les livres furent interdits par les nazis, créa elle-aussi à Dahlem, avec Helene Jacobs, Melanie Steinmetz et Franz Kaufmann, un ancien haut-fonctionnaire d'origine juive, une organisation clandestine qui fournissait de faux-papiers et des cartes de rationnement à des juifs ; Gertrud Staewen fut arrêtée par la Gestapo mais put survivre à la guerre, contrairement à Franz Kaufmann, qui fut arrêté en 1943, torturé, déporté, et assassiné le 17 février 1944 au camp de concentration de Sachsenhausen.

    

L'association catholique Saint-Raphaël et l'œuvre d'assistance de l'ordinariat épiscopal de Berlin ont également apporté leur aide aux persécutés. Margarete Sommer, une universitaire qui avait perdu son poste en raison de son engagement catholique, aida ainsi à partir de 1935 des catholiques d'origine juive. Elle devint en 1941 directrice de la section d'aide aux juifs convertis au catholicisme de l'ordinariat épiscopal de Berlin. Et le 22 mars 1935 fut fondé le "Comité d'aide aux non-aryens catholiques", qui proposait une aide juridique aux catholiques d'origine juive, et les aidait à trouver un pays d'accueil pour fuir l'Allemagne. 


Les Quakers, qui étaient partisans de la tolérance, de la non-violence et de la paix, purent aider jusqu'en 1939 plus d'un millier de juifs à émigrer, grâce à leurs contacts avec les communautés de Quakers à l'étranger. Ils furent persécutés par les nazis.

 

"Communauté pour la paix et le renouveau"

Hans Winkler, Günther Samuel et Erich Schwarz fondèrent après le pogrom de 1938 un cercle de discussion hostile au régime, qui se faisait passer pour un groupe d'épargne ("Sparverein Hoher Einsatz"). Hans Winkler était employé au tribunal de première instance de Luckenwalde, et assista à partir de 1933 en tant que greffier à des interrogatoires de la Gestapo. Révolté par ce qu'il y vit, il devint un ennemi du régime et décida d'apporter son aide aux persécutés. En août 1943, le couple Samuel et leur fils de dix ans furent déportés, le cercle d'amis n'ayant pas réussi à leur trouver une cachette. Peu de temps après, Winkler parvint à cacher chez lui Eugen Herman-Friede, un adolescent de dix-sept ans, qui vivait depuis le début de l'année 1943 dans la clandestinité à Berlin.

A l'automne 1943, Winkler entra en contact avec Werner Scharff, qui fut l'initiateur de la "Communauté pour la paix et le renouveau" ("Gemeinschaft für Frieden und Aufbau"). Le pseudo-groupe d'épargne devint ainsi une association d'aide aux persécutés, à laquelle adhéraient une vingtaine de personnes. Werner Scharff était juif et fut déporté en août 1943 au ghetto de Theresienstadt ; il parvint à fuir un mois plus tard et retourna à Berlin, où il vécut dans la clandestinité. Il procura à des juifs, grâce à son grand réseau de relations, des faux-papiers et de l'argent, et leur trouva des cachettes. Il écrivit également des tracts pour la "Communauté pour la paix et le renouveau", qui voulait informer la population allemande du véritable caractère du régime nazi, inciter les soldats à déposer les armes, et qui appelait à la résistance contre le nazisme. Ces tracts furent déposés dans des boîtes aux lettres à Berlin et expédiés à des centaines de personnes ; certains purent même être acheminés clandestinement aux Pays-Bas et en France.

En octobre 1944, la Gestapo démantela ce réseau et arrêta Hans Winkler et Werner Scharff. Ce dernier fut assassiné le 16 mars 1945 dans le camp de concentration de Sachsenhausen, quelques semaines avant la libération du camp. Eugen Herman-Friede, qui avait pris part aux activités de la "Communauté pour la paix et le renouveau", fut arrêté le 11 décembre 1944 mais parvint à survivre à sa détention. La plupart des membres de ce groupe de résistance purent survivre grâce à la confusion qui régnait en Allemagne lors des derniers mois de la guerre.

 

L'"Opération Sept"

Hans von Dohnanyi travaillait au Ministère de la Justice et faisait partie du groupe de résistance formé au sein du contre-espionnage et dirigé par Hans Oster, qui voulait éliminer Hitler et collabora à la conspiration du 20 juillet 1944. Profondément choqué par les exactions commises par les nazis envers les juifs, Hans von Dohnanyi aida des persécutés, rassembla des preuves documentant les crimes nazis, et prépara le putsch du 20 juillet 1944.


A l'automne 1941, lorsque commencèrent les déportations massives de juifs, le groupe de résistance du contre-espionnage ne put pas protester ouvertement, pour ne pas mettre en danger les activités du réseau, qui prenait part à la conspiration contre Hitler. Hans von Dohnanyi transmit aux généraux des rapports rédigés par son beau-frère Dietrich Bonhoeffer sur la déportation des juifs, afin de les inciter à agir. Mais les militaires n'entreprirent rien pour empêcher ces crimes, et les déportations continuèrent. Le groupe de résistance décida alors de sauver au moins quelques familles juives, en les déclarant en tant que pseudo-agents du contre-espionnage, ce qui permit à quinze juifs berlinois de trouver refuge en Suisse. Cette action fut appelée "Opération Sept" ("Operation Sieben"), car il s'agissait au début d'aider sept personnes à fuir. Finalement, le groupe continua ses activités d'aide aux persécutés et entreprit de secourir davantage de personnes, afin d'en sauver le plus grand nombre possible.

L'amiral Wilhelm Canaris, chef du contre-espionnage, couvrit ces activités. Pendant les années précédentes, il avait déjà aidé des juifs à fuir et il en protégeait en gardant des officiers d'origine juive au sein du contre-espionnage, malgré la loi de 1935 interdisant aux juifs d'exercer des activités dans l'armée. Couverts par Canaris, des officiers du contre-espionnage organisèrent la fuite de juifs des Pays-Bas, qui devaient être déportés, en prétendant que c'étaient des espions qui devaient s'infiltrer en Amérique du Sud. Entre mai 1941 et janvier 1942, 468 juifs allemands et néerlandais purent ainsi trouver refuge en Espagne et au Portugal, et s'exiler à partir de ces pays vers des pays d'accueil. Cette opération fut nommée l'"Action Aquilar".

L'"Opération Sept" fut découverte par des officiers du contre-espionnage qui soutenaient le régime, et les résistants furent dénoncés à la Gestapo, qui arrêta le 5 avril 1943 Hans von Dohnanyi ; il fut déporté au camp de concentration de Sachsenhausen, où il fut assassiné le 8 avril 1945. Hans Oster, qui avait tenté de prendre la défense de Hans von Dohnanyi, fut limogé, puis arrêté le 21 juillet 1944 en raison de sa participation au putsch du 20 juillet 1944. Il fut déporté au camp de concentration de Flossenburg, où il fut exécuté le 9 avril 1945. Wilhelm Canaris fut forcé de démissionner en février 1944, et fut arrêté. Les nazis le pendirent le 8 avril 1945 avec une corde de piano, afin de prolonger ses souffrances.

 

Le groupe d'Ewald Behrendt

Un groupe de résistance du sud de l'Allemagne, dirigé par Ewald Behrendt, parvint au cours de l'année 1936 à aider des centaines de persécutés à fuir l'Allemagne en organisant un réseau qui leur permettait de passer la frontière germano-suisse. Ce groupe exista jusqu'à la fin de la guerre, et aida également des pilotes alliés à franchir clandestinement la frontière.

 

Le "Groupe 07"

L'organisation de résistance bavaroise "Groupe 07" ("07-Gruppe") cacha des juifs, des prisonniers de guerre et des travailleurs forcés, leur procura de la nourriture et des faux-papiers, et les aida à franchir clandestinement la frontière.

 

L'organisation "Union européenne"

En 1942 et 1943, l'organisation berlinoise "Union européenne" ("Europäische Union") procura des faux-papiers, de la nourriture et des cartes de rationnement à des juifs. Mais un espion de la Gestapo infiltra le réseau, qui fut démantelé en septembre 1943 ; presque tous les membres du groupe furent arrêtés.

 

Le groupe de l'"Oncle Emil"

Les membres du groupe de résistance berlinois de l'"Oncle Emil" ("Onkel-Emil-Gruppe") avaient beaucoup d'amis juifs ; certains d'entre eux avaient pu s'exiler avant la "Nuit de Cristal", mais les autres étaient en danger de mort. Ils leur procurèrent des faux-papiers, les aidèrent à fuir à l'étranger, s'occupèrent de leurs proches, pour lesquels ils trouvèrent des cachettes. Lorsque le chaos régna après les bombardements alliés, les membres du groupe procurèrent à leurs protégés des cartes de rationnement en les faisant passer pour des victimes des bombardements, et entrèrent même par effraction dans le bureau distribuant des cartes de rationnement pour en dérober. Le groupe de l'"Oncle Emil" resta actif jusqu'à la fin de la guerre et ne fut pas découvert.