Le cercle de Kreisau était un cercle de
discussion et de réflexion constitué d'amis unis par le rejet du régime hitlérien
et soudé par la volonté de préparer le renouveau de l'Allemagne
post-hitlérienne. Il comptait, de 1938 (depuis la crise
des Sudètes) jusqu'à l'attentat du 20 juillet 1944, vingt membres actifs et
environ vingt sympathisants. Son nom de "cercle de Kreisau", qui
lui a d'ailleurs été assigné par la Gestapo, se réfère au lieu de rencontre
du cercle de discussion, le domaine de la famille von Moltke, situé à Kreisau, en
Silésie, où se sont réunis de 1940 à 1943, pour réfléchir aux mesures à
prendre contre
le régime nazi et à une nouvelle Allemagne après la dictature, des fonctionnaires, des ecclésiastiques
des deux confessions chrétiennes, des officiers ainsi que des politiciens
sociaux-démocrates et conservateurs. Une grande partie des membres du cercle avait
appartenu à des mouvements de jeunesse qui mettaient l'accent sur le dialogue entre
les générations et les différentes couches sociales, en organisant des camps
et des activités en plein air qui permettaient aux enfants de fréquenter des
gens de tous les milieux et de tous les âges. Cette expérience a donné à ce cercle son
profil caractéristique, qui consistait en la consultation mutuelle de personnes
issues d'horizons divers, en un échange alliant
expérience et idées progressistes.
Le cercle a été créé par Helmuth James
Graf von Moltke, petit-neveu du Feldmarschall du XIXe
siècle. Sa mère étant originaire d'Afrique du Sud, il a reçu une éducation
de tradition britannique. Il s'est intéressé très tôt, pendant sa jeunesse
passée à Berlin, à
des problèmes sociaux, ce qui lui a valu le surnom de "comte rouge".
Il s'est engagé entre autres dans les camps de travail volontaires en Silésie,
sensés ouvrir le dialogue entre les différentes couches sociales et les
générations. Von Moltke fit des études de droit, mais refusa après la prise du
pouvoir de Hitler en 1933 un poste de juge, préférant être actif en tant qu'avocat et essayer d'agir contre
l'injustice et les jugements arbitraires, en offrant son aide juridique à ses amis et connaissances juifs. Sa mère
l'incita à aller en Angleterre pour entrer en contact avec des amis de sa
famille, et il y passa des examens qui lui permirent d'ouvrir un cabinet d'avocat
en Angleterre
et de conserver ainsi des contacts dans le monde libre.
Von Moltke, qui n'hésitait pas à
énoncer ses critiques ouvertement, condamna dès le début l'ascension et la prise du pouvoir de
Hitler. Le régime nazi allait à l'encontre de sa vision du monde humaniste
fondée sur l'éthique
chrétienne, et déjà avant la prise de pouvoir de Hitler en 1933, il mit son
entourage en garde contre le NSDAP et Hitler, étant persuadé que celui-ci,
s'il était au pouvoir,
représenterait un danger de guerre immédiat. Très tôt, il fut au courant des
crimes commis par le régime nazi en Pologne, envers les prisonniers de guerre
et les juifs en Europe. En octobre 1942, il apprit l'existence des "fourneaux
SS"
où étaient "traités" 6 000 personnes par jour. Von Moltke fut
arrêté au début de l'année 1944, condamné à mort le 11 janvier 1945 et exécuté le 23
janvier 1945.
Au
début de l'année 1940, une autre personnalité, qui
elle aussi allait énormément déterminer le travail et les objectifs que le
cercle se fixait, se joignit au cercle de Kreisau : Peter Graf Yorck von
Wartenburg, un cousin lointain de von Moltke, qui avait également fondé en 1938
un groupe de résistance. Haut fonctionnaire de l'État depuis
1938, il portait lui aussi un grand nom de l'histoire allemande, lié à la
fin de l'occupation napoléonienne et au rapprochement germano-russe. Au début,
le jeune juriste vit dans le national-socialisme une chance pour surmonter
l'humiliation du peuple allemand après la défaite de 1918. Mais avec le temps, il s'en
détourna de plus
en plus, la violence, l'injustice et le traitement de la population juive lui
ayant ouvert les yeux sur le véritable visage de l'idéologie nazie.
En 1938, il se mit alors à la recherche de gens
partageant ses idées. C'est au printemps 1940 que Yorck et von Moltke se revirent lors d'une rencontre familiale, et qu'ils
échangèrent leurs avis et
préoccupations. Par la suite, ils firent connaissance de leurs cercles d'amis
respectifs, ce qui fit s'agrandir entre 1940 et l'automne 1941 le cercle de
Kreisau. C'est dans la maison de Peter Graf Yorck von Wartenburg à
Berlin-Lichterfelde qu'eurent lieu la plus grande partie des rencontres de
discussion. En 1942, il fut incorporé dans la Wehrmacht, ce qui lui permit de
fortifier et d'élargir ses contacts avec des opposants du régime au sein de
l'appareil militaire. A la suite de l'arrestation de von Moltke en janvier 1944, il
proposa ses services à Claus Schenk Graf von Stauffenberg pour la
préparation et l'exécution du putsch du 20 juillet 1944. Il fut arrêté
pendant la
nuit du 20 au 21 juillet, quelques heures après l'attentat, et fut exécuté le 8 août 1944.
En 1938, les résistants comprirent qu'il
serait illusoire de tenter un putsch contre Hitler, étant donné qu'une grande
partie de la population soutenait le dictateur après l'Anschluß et l'annexion
des Sudètes. Ils se rassemblèrent alors pour essayer de
concrétiser un renouveau de l'Allemagne, et prirent contact avec des
spécialistes divers pour discuter les fondements d'une nouvelle Allemagne
post-hitlérienne.
Le lien qui unissait les membres du cercle était le refus du régime
national-socialiste et la protestation - motivée pour la plupart des résistants par
l'éthique chrétienne - contre les crimes de ce régime et la guerre,
beaucoup d'entre eux ayant fait l'expérience douloureuse de la Première Guerre
Mondiale. Mais l'on ne peut pas dire qu'il s'agissait d'un cercle religieux.
Certes, les valeurs chrétiennes étaient pour la plupart des membres du cercle
une base fondamentale de discussion, mais ce sont surtout des thèmes
étatiques, économiques et culturels qui prévalaient dans les débats. Ce
groupe n'était pas pour autant un cercle
d'intellectuels sans relation avec la pratique, car tous les membres étaient confrontés dans leur vie
professionnelle et dans leurs engagements personnels aux réalités de l'existence
et faisaient preuve de
réalisme.
Les membres du cercle de Kreisau se
représentaient l'Allemagne post-hitlérienne comme un État démocratique et civil, un État de droit assurant le respect des droits de l'homme. Le droit au travail et la socialisation du secteur
économique étaient deux autres principes fondamentaux pour le nouvel État,
dans lequel la
propriété privée serait protégée, mais où les unités de production les
plus importantes seraient pour le bien commun entre les mains de l'État. Les citoyens, et c'est là que réside l'aspect le plus moderne du
"programme" du cercle de Kreisau, devaient pouvoir bénéficier de libertés et
d'une large
responsabilité dans la nouvelle Allemagne. Celle-ci, débarrassée
du modèle du Deuxième Reich d'un État autoritaire, devait être reconstituée à
partir de la base, c'est à dire que l'État devait reposer sur des petites
communautés bénéficiant d'une autonomie administrative. Cet aspect dénote la
méfiance conservatrice à l'égard des sociétés de masse modernes. Mais ceci
ne représentait en aucun cas un repli sur soi. Le cercle de Kreisau, qui
défendait des valeurs humaines, s'opposait à ce que l'Etat soit dominé par
l'économie, et souhaitait que la nouvelle Allemagne soit ouverte au monde
occidental, dans la perspective d'une union européenne.
Mais avant tout, l'État allemand devait être
renouvelé de manière démocratique en commençant par la base. Von Moltke
et Yorck savaient que les Allemands auraient besoin d'une éducation pour
apprendre à faire bon usage de leur nouvelle liberté, dont ils avaient été démunis
pendant plus d'une décennie. Ceci ne pouvait selon eux se réaliser sans les
principes éthiques chrétiens. C'est pour cette raison que le cercle n'était pas
en faveur d'une séparation stricte de l'Église et de l'État, parce que les Églises
catholique comme protestante devraient être ancrées dans une société
oecuménique et y agir en tant qu'instances politiques et morales. Le citoyen
serait alors en mesure de s'épanouir et de découvrir ainsi par lui-même l'ordre
naturel, puis d'œuvrer vers sa réalisation dans la société. Pour réaliser ce renouveau de la société et de l'État à partir du bas,
les membres du cercle voulaient transformer l'appareil administratif anonyme et oppressant en une
administration plus immédiate et concrète, permettant le maximum d'autarcie aux
plus petites unités locales ainsi reliées dans un système démocratique et extrêmement
décentralisé.
Une autre revendication essentielle du cercle
de Kreisau était la sécurité
juridique, donc le rétablissement d'un État de Droit, qui garantirait la liberté de
conscience, la tolérance et le respect envers les peuples d'Europe. Sans la
constitution d'un État de Droit, aucune politique extérieure ne serait
possible. Les crimes commis par les nazis au nom du peuple allemand seraient à
punir sans laisser valoir l'excuse d'avoir eu à obéir à un ordre. Ceux qui
avaient donné des ordres blessant le Droit naturel et le Droit International Public
seraient à inculper en premier lieu. L'Allemagne devrait porter la responsabilité
des crimes commis contre les peuples européens, mais les poursuites
judiciaires devraient être du ressort d'une nouvelle justice allemande. Le cercle
concevait un Droit
International Public des Peuples du Monde comme fondement d'une nouvelle
communauté internationale des peuples, qui serait alors empreinte d'une nouvelle
autorité morale et juridique. Le projet prévoyait la constitution d'un tribunal
international de guerre constitué des vainqueurs, de deux représentants
de pays neutres et d'un juge du pays vaincu. L'idée était de créer ainsi le
"règne du Droit parmi les peuples" du monde entier.
Le cercle de Kreisau à tenté d'établir, par l'intermédiaire de
ses différents
membres, un contact avec d'autres groupes de résistance, comme
le groupe qui s'était constitué autour de Franz Sperr au sud de l'Allemagne et
qui était en contact
avec de hauts officiers, ou encore avec un groupe de leaders travaillistes catholiques de
Cologne, et avec le cercle de Fribourg. Malgré tous les efforts pour établir le
contact avec la "Rose Blanche" à Munich, ceci n'a pas pu se
réaliser avant l'arrestation de ce groupe. Le cercle avait également des contacts avec des
communistes modérés non staliniens. A partir de 1943, divers membres du cercle
de Kreisau décidèrent de participer activement à des conspirations et prirent contact avec Ludwig
Beck, Carl Friedrich Goerdeler, Ulrich von Hassel et Claus Schenk von
Stauffenberg. La plupart des membres du cercle furent inculpés de haute trahison après le putsch échoué du 20
juillet 1944, et furent condamnés à mort.
Les membres principaux du cercle de Kreisau :
Adam von Trott zu Solz
Ce juriste fit des séjours d'études à Oxford et en Chine. Ces séjours à l'étranger, pendant lesquels il
fut en contact
avec des opposants au régime nazi, l'ont beaucoup marqué. En 1937, il fit la
connaissance de von Moltke à Oxford, et en 1940, de Yorck von Wartenburg. La
même année, il reçut un poste au ministère des Affaires étrangères, où il
commença à prendre contact avec les groupes constitués autour de Hans von Dohnanyi et
Dietrich Bonhoeffer. Adam von Trott zu Solz était dans le cercle le spécialiste
des Affaires étrangères. Il fut arrêté cinq jours après l'attentat du
20 juillet 1944 et exécuté le 26 août 1944.
Hans-Bernd von Haeften
Juriste, issu d'un milieu empreint du protestantisme libéral, il passa un an d'étude en Angleterre, à Cambridge. Il était lié d'amitié avec Dietrich
Bonhoeffer et fut en contact étroit avec Martin Niemöller. Il travailla à
partir de 1933 au ministère des Affaires étrangères, dont il devint l'un des plus hauts
fonctionnaires, et où il était protégé par le secrétaire d'État von
Weizäcker, personnage-clé de la conspiration menée par von Stauffenberg.
Malgré sa fonction de diplomate, il refusa d'adhérer au NSDAP. Proche du
cercle de Kreisau, il aurait obtenu le poste du secrétaire d'État au ministère
des Affaires étrangères après le putsch du 20 juillet 1944. Il fut condamné à mort et
exécuté le 15 août 1944.
Julius Leber
Cet ancien parlementaire social-démocrate de la République de Weimar était spécialiste en
matière de défense. Le 31
janvier 1933, il fut arrêté pour la première fois, puis libéré grâce aux
manifestations de masse organisées pour sa libération. Arrêté de nouveau, il
fut interné dans des camps de concentration jusqu'en 1937. A partir de l'automne
1943, il entra en contact avec le cercle
de Kreisau par l'intermédiaire de Carlo Mierendorff. Julius Leber, qui fut une figure marquante de
la Résistance allemande, faisait également partie du groupe de Goerdeler, et serait
devenu après le putsch du 20 juillet
ministre de l'Intérieur, ou même chancelier du Reich. Dénoncé, il fut
arrêté début juillet 1944, avant
l'attentat, fut condamné à mort le 20 octobre 1944, puis
exécuté le 5 janvier 1945.
Theodor Haubach
Theodor Haubach était l'ami étroit de Carlo Mierendorff, avec lequel il publiait les
"Neue Blätter für den Sozialismus", auxquelles ont collaboré entre
autres le pasteur Harald Poelchau, Adolf Reichwein et Otto Heinrich
von der Gablentz. En 1923, Theodor Haubach soutint sa thèse sous la direction du philosophe
Karl Jaspers. En 1929, il devint le porte-parole du ministère de l'Intérieur. En 1934, il fut arrêté et interné dans le camp de concentration
d'Esterwegen. A partir de l'automne 1942, il fut membre du cercle de Kreisau,
qui prévoyait pour lui le poste du porte-parole du gouvernement. Il fut arrêté
quelques semaines après
l'attentat du 20 juillet 1944 et exécuté le 23 janvier 1945.
Carlo Mierendorff
Membre du SPD et membre du Reichstag à partir de 1930, il fut l'un des derniers
à encore oser s'opposer ouvertement au NSDAP et à son chef de
propagande Josef Goebbels au Parlement. Après la prise de pouvoir de Hitler, il fut
arrêté, maltraité et emprisonné dans les camps de concentration d'Osthofen,
de Lichtenburg, de Papenburg, de Börgermoor, de Torgau et de Buchenwald
jusqu'en 1938. Après sa libération, il entra en contact avec le cercle de
Kreisau, où il influença largement la discussion sur la politique sociale. Il
fut un médiateur entre les catholiques et les socialistes du cercle, et parvint
à leur faire surmonter leurs divergences. Mierendorff mourut en décembre 1943 lors
d'un bombardement allié à Leipzig.
Adolf Reichwein
Ce social-démocrate et pédagogue réformateur, qui avait perdu en 1933 son poste de
professeur d'Histoire et d'Instruction civique à l'Académie pédagogique de
Halle, rejoignit le cercle de Kreisau en 1940. Il était prévu par le cercle
qu'Adolf Reichwein devienne ministre de l'Éducation et de la Culture après
l'attentat du 20 juillet 1944. Il était non seulement en
contact avec le cercle de Kreisau, avec le cercle constitué autour de Wilhelm Leuschner et de Julius
Leber, depuis
l'été 1944 avec l'opposition militaire, mais aussi avec des représentants de
groupes de résistance communistes qui s'étaient formés autour de Anton
Saefkow, Franz Jakob et
Bernhard Bästlein. En raison de ces contacts, il fut arrêté début juillet 1944 et
exécuté le 20 octobre 1944.
Otto Heinrich von der Gablentz
Très influencé par les idées des mouvements de jeunesse, il s'engagea au
début de la République de Weimar pour le dialogue entre les mouvements sociaux et
nationalistes, afin d'éviter la confrontation entre ces groupes. Il était proche du "socialisme
religieux" de Paul Tillich, et collabora aux "Neue
Blätter für den Sozialismus" avec Carlo Mierendorff et Theodor
Haubach.
Par l'intermédiaire de Horst von Einsiedel, il intégra en 1940 le cercle de
Kreisau, sur lequel il exerça une énorme influence programmatique. Expert en transport militaire, il a pu établir en tant
qu'officier d'occupation en
Norvège le contact avec la résistance norvégienne. La Gestapo ne sut pas
qu'il avait participé au putsch
du 20 juillet 1944, et il put ainsi survivre à la
guerre.
Carl Dietrich von Trotha
Haut fonctionnaire au ministère de l'Économie, où il fut en
contact avec Arvid Harnack et Harro Schulze-Boysen, il fut avec Horst von Einsiedel
l'expert en économie du cercle de Kreisau. Dans sa jeunesse, le cousin de von
Moltke fut influencé par les idées des scouts, et ses séjours à
l'étranger l'incitèrent à s'engager pour une unification de l'Europe. L'élève du
socialiste religieux Adolf Löwe et du philosophe Max Horkheimer à l'Institut
de Recherche en Sociologie ("Institut für Sozialforschung") de Francfort échappa à la
Gestapo et survécut au régime nazi.
Horst von Einsiedel
Membre du SPD à partir de 1930 et proche de von Moltke, dont il avait fait
la connaissance dans sa jeunesse dans des camps de travail en Silésie, il entra
dès 1939 dans le cercle de Kreisau. Au début, il s'occupa de questions de politique économique, puis
se concentra sur la
politique agricole. Il échappa à la Gestapo après le 20 juillet 1944, mais
fut arrêté après la guerre, en 1945, par la police secrète
soviétique. Il mourut en 1948, interné dans le camp de concentration
de Sachsenhausen, qui fut utilisé après la guerre par les Soviétiques.
Theodor Steltzer
Ce haut-fonctionnaire de la République de Weimar, qui avait fait des études de
Sciences politiques et de Sciences économiques, s'est opposé très tôt aux
nazis, c'est pourquoi il perdit son poste dès la prise de pouvoir de Hitler en 1933.
Au
début de la guerre, il fut incorporé dans la Wehrmacht et reçut en 1940
un haut poste militaire dans la Norvège occupée, où il entra en contact avec la
résistance norvégienne. Il fit la
connaissance de von Moltke par l'intermédiaire d'Otto von der Gablentz et
rejoignit le cercle de Kreisau, qui voyait en lui le futur administrateur du Schleswig-Holstein. Steltzer
survécut
à la guerre.
Harald Poelchau
Élève de Paul Tillich, représentant du socialisme religieux, Harald
Poelchau était aumônier pénitentiaire à Berlin. Dans les prisons, il apporta
son
soutien moral à des centaines de prisonniers politiques, en particulier à ceux
qui attendaient leur exécution. Il fut membre du cercle de Kreisau, mais ne fut
pas démasqué par la Gestapo. Après le 20 juillet 1944, c'est lui qui transmit beaucoup de messages et de lettres aux proches des
incarcérés.
Hans Peters
Professeur de Droit et de Sciences politiques à Berlin à partir de 1928, Peters
resta en contact après 1933 avec ses amis du parti centriste, et entra en
contact en 1940 avec le cercle de Kreisau, ainsi qu'avec Ernst von Harnack et Ruth Friedrich,
qui apportaient leur aide aux juifs persécutés. Son appartenance au cercle de
Kreisau ne fut pas découverte par la Gestapo et il survécut au régime nazi.
Alfred Delp
Jésuite empreint des principes des mouvements de jeunesse, il était
prêtre à Munich et fut rédacteur de la revue catholique "Stimmen der
Zeit" jusqu'à son interdiction en 1941. Alfred Delp a apporté sa
contribution au programme élaboré par le cercle de Kreisau dans le domaine de
la politique sociale, en l'imprégnant des grands principes sociaux du
catholicisme. Il a également mis le cercle de Kreisau en contact avec divers
groupes de résistance munichois. Alfred Delp fut arrêté le 28 juillet 1944 à
Munich, condamné à mort le 11 janvier 1945 et exécuté le 2 février 1945.
Lothar König
Jésuite ayant de hautes fonctions dans le collège de jésuites Berchman à
Pullach, il est considéré comme l'un des plus importants messagers de la
Résistance allemande. Il participa activement au cercle de réflexion de
Kreisau, et informa les évêques de Fribourg et de Berlin des objectifs de ce
groupe. Son engagement dans le cercle de Kreisau fut découvert par la Gestapo
en septembre 1944. Il se cacha alors dans la cave à charbon du collège de
jésuites Berchman jusqu'à la fin de la guerre.
Augustin Rösch
Ce jésuite avait une charge de provincial dans la province jésuite du Sud
de l'Allemagne. Il eut affaire à plusieurs reprises au régime nazi, qui
persécutait les jésuites. Rösch a toujours pris la défense de ses frères
jésuites et les a protégés par son silence. Il rejoignit le cercle de Kreisau
en 1941 et y introduisit quelques temps après Alfred Delp. Le rôle de ces deux
ecclésiastiques était d'aider le cercle à surmonter les divergences
confessionnelles, afin de poser les bases d'une nouvelle société œcuménique.
Par l'entremise d'Augustin Rösch, le cercle de Kreisau put entrer en contact
avec la Résistance catholique. Recherché par la Gestapo après l'attentat du
20 juillet 1944, il fut arrêté le 11 janvier 1945, fut torturé, et resta
emprisonné jusqu'à la fin de la guerre.
Paulus van Husen
Juriste et important politicien du parti centriste en Silésie, il rejoignit
le cercle de Kreisau dès 1940. Sa mission consistait à consolider les contacts
avec le clergé catholique. Il était prévu qu'il devienne secrétaire d'État
au ministère de l'Intérieur après la chute du régime hitlérien. Il fut
arrêté en août 1944 et condamné le 19 avril 1945 avec son ami Hans Lukaschek
à trois ans de prison ferme, mais fut libéré une semaine plus tard par les
troupes soviétiques.
Hans Lukaschek
Hans Lukaschek, important
politicien centriste de Silésie, était le membre le plus âgé du cercle de
Kreisau. Il avait de hautes fonctions dans la République de Weimar, et
dénonça dès 1930 le danger que représentait le national-socialisme. Il
fréquenta à partir de 1938 von Moltke, et, bien qu'il n'ait pu prendre part
régulièrement aux séances de discussion du cercle de Kreisau, il était
informé de leurs réflexions et de leurs projets. Il prit part activement à la
conspiration du groupe de von Stauffenberg et fut arrêté le soir du 20 juillet
1944. Il fut libéré peu de temps avant la fin de la guerre.
Eugen Gerstenmaier
Eugen Gerstenmaier travaillait à Berlin au bureau des relations ecclésiastiques
internationales, ce qui lui permit d'entreprendre des voyages à l'étranger,
même pendant la guerre, et de jouer ainsi un important rôle dans le milieu
résistant du ministère des Affaires étrangères. Il fut introduit par
Hans-Bernd von Haeften et Adam von Trott zu Solz dans le cercle de Kreisau. Le
20 juillet 1944, Eugen Gerstenmaier était avec Peter Graf Yorck von Wartenburg
au Bendlerblock, bâtiment du haut-commandement de l'armée de terre, pour
accomplir les mesures prévues après l'attentat contre Hitler. Il fut arrêté
le soir même et accusé de haute trahison, mais ne fut pas condamné à mort.
Il fut condamné le 11 janvier 1945 à une peine de sept ans de prison ferme et
fut libéré par les Américains à la fin de la guerre.